Les derniers courants de l'architecture moderne

Pas toujours distincts et successifs, les courants stylistiques en architecture sont une réalité théorique et matérielle, utile à l’intelligence des évolutions des goûts et des techniques. Si la différence entre les genres n’est plus aussi marquée qu’autrefois, il est néanmoins possible de relever, parmi les dernières modes, les traits caractéristiques de chacune, les raisons respectives de leur apparition, et d’offrir des exemples propres à s’en faire une idée juste. L’éclosion des nouveaux courants mondiaux date de 1960 selon la plupart des spécialistes. Leur développement est simultané. Les mots d’ordre : retenue, efficience, austérité. Le premier courant qu’on va succinctement exposer unit très bien cette triple consigne d’exécution.  

Le brutalisme ou l’empire du béton brut
 

Véritable corollaire de la révolution industrielle des années 70, le béton a accaparé les esprits, les débats et a pris même une valeur politique, chez les classes sociales peu favorisées. Ce matériau rigide et résistant devenait, en architecture, l’outil d’expression principal d’une société luttant contre les inégalités. Pureté des formes et des mesures, ouvrages imposants, définissent ce courant. Les bâtiments issus de ce mode de création sont généralement massifs et dépouillés d’attraits, abondant en fenêtres, pleins d’aspérités, et d’esthétique pesante, grisâtre, et somme toute, brutale. Il n’est d’ailleurs pas surprenant que ces ouvrages singuliers et trop dissociés des codes historiques aient été copieusement attaqués. Compositions sombres et sans vitalité, dénaturant le paysage, etc., tel est le résumé du discours critique de l’époque. Les illustrations de ce style bizarre sont nombreuses. L’ensemble d’habitation de Halen Kirchlindach, en Suisse, et l’Hôtel de ville de Boston représentent l’identité plastique de ce courant.
 

La techno-architecture ou l’expressionisme culturel
 

Ce courant, bien moins morose et plus sophistiqué que le précédent, est aussi apparu dans les années 70, et constitue le résultat des perfectionnements technologiques ayant marqué la décennie. Plus tard, le courant néo-futuriste s’en est inspiré. Acier, béton, verre, sont les matériaux principalement utilisés ; et l’esthétique de ces constructions ressort de toutes les réalisations techniques, mises en évidence. Autre particularité : ce courant touche même à la décoration intérieure. Les fondateurs de ce mouvement voyaient dans ce nouvel ordre de composition une certitude de pérennité et d’évolutions grandioses : la technologie alimentait des ambitions démesurées. Les tours de Norman Foster à Londres, ou la Hearst Tower de New York vous donneront un aperçu captivant de ce style admirablement inventif.  

Le déconstructivisme, ou l'onirisme architectural
  

Là encore, il s’agit d’une transposition matérielle des idées et sentiments d’une génération. Fondé par Philip Johnson, à la fin des années 80, ce courant, le moins conformiste qui soit, était censé traduire le doute et la précarité du monde actuel, par ses déséquilibres de structure et l’éclatement des parties. La part de la fantaisie, du jeu d’optique, et même de l’humour, y est grande. L’aspect de ces constructions abasourdit, échauffe à coup sûr l’imagination, et donne l’impression d’un désordre bien réglé, d’un bouleversement contenu, d’un rêve tangible. De manière générale, les formes qui ressortent de ces créations sont strictement géométriques ; mais l’addition et le mélange de ces formes (cylindres, cônes, cube, pyramides, etc.) produit un effet final qui échappe aux réductions simples et prévisibles. Si vous connaissez peu ce courant et que vous êtes curieux, jetez un œil sur les fascinantes « divagations » de l’architecte Frank Gehry.

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